On a beaucoup écrit sur la période nazie de l'Allemagne, et ces derniers temps, des "thrillers" qui déroulent leur intrigue sur la toile de fond de la montée de la barbarie hitlérienne (je vous renvoie à un article précédent sur la Trilogie berlinoise de Philip Kerr).
Le roman de Tobie Nathan, intitulé Qui a tué Arlozoroff? nous renvoie une fois encore aux arcanes du nazisme, il s'agit encore d'une sorte de thriller puisque le roman commence par l'assassinat du dirigeant juif Victor Arlozoroff sur une plage de Tel Aviv en 1933. Mais la perspective est cette fois centrée non sur la victime Arlozoroff, ni sur un improbable enquêteur de notre époque, Ezra Moreno, envoyé en Israël pour écrire un ouvrage intitulé... Qui a tué Arlozoroff?, mais sur une femme hors du commun, Magda Goebbels, la femme du très influent ministre de la propagande nazie, qui terminera ses jours dans le bunker berlinois d'Hitler après avoir tué ses six enfants et s'être suicidée avec Goebbels.
Magda est belle, très belle, elle est différente, elle se sait différente; elle exerce une fascination irrésistible sur tous les hommes qui croisent son chemin, à commencer par son premier amour, le juif Victor Arlozoroff. Le roman est construit autour de la prise de conscience par cette femme d'un destin hors du commun, d'un destin fusionnel avec celui d'une Allemagne gagnée par la folie de la destruction des juifs. De déesse aryenne, elle en devient veuve noire, ou plutôt mante religieuse, se repaissant inlassablement des hommes qui croient bien naïvement la posséder. Jusqu'à dévorer le seul homme qu'elle a véritablement aimé, pour lui-même, pour ce qu'il était et non pour ce qu'il représentait...
Roman de la folie d'une femme et d'un peuple, Qui a tué Arlozoroff? ne tombe pas dans les clichés car seule l'Histoire a finalement jugé les acteurs de cette sombre période.