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9 mars 2014 7 09 /03 /mars /2014 11:47

          L'injustice et l'intolérance sont universelles et éternelles, hélas!

           Elles sont au coeur d'un roman qui a rencontré un énorme succès aux Etats-Unis depuis sa publication en 1960: Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, de Harper Lee. Preuve d'ailleurs que ma première phrase est tristement vraie: ce livre, qui est depuis longtemps au programme de nombreux lycées ou universités outre-atlantique, se voit aujourd'hui critiqué, voire retiré de ces programmes, pour des raisons plus ou moins farfelues (grossièreté, incitation à la prostitution! sic!). L'amérique n'en a pas fini avec ses démons même à l'heure d'une présidence noire.

          Nous sommes dans le "deep south" américain, en Alabama dans les années 1930. Un avocat blanc, Atticus Finch, élève seul ses deux enfants, Jem et Scout, 13 et 9 ans respectivement dans une petite ville où tout le monde se connaît et où les noirs sont évidemment victimes de la ségrégation raciale.

          C'est Scout, la fillette, qui est la narratrice. La vie des enfants ressemble à celle de n'importe quel enfant du monde entre jeux, bagarres et mystères liés au monde adulte. Jusqu'au jour où un noir est (faussement) accusé de viol sur une blanche. Atticus est chargé de sa défense et une partie du récit tourne autour du procès et de ses conséquences. La vie des deux enfants en sera à jamais changée.

          Entre humour et férocité, le récit de la fillette nous entraîne d'emblée dans un univers que nous pourrions penser éloigné de nous et qu'il nous serait pourtant facile de reconnaître un peu partout autour de nous aujourd'hui encore. C'est cette universalité de l'unique roman de Harper Lee qui touche aussi profondément le lecteur: le chant de l'oiseau moqueur nous poursuivra longtemps après avoir fermé le livre!


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1 mars 2014 6 01 /03 /mars /2014 09:47

Un-sport-et-un-passe-temps          Nombre d'écrivains américains adorent la France. Beaucoup à cause de Paris; certains pour la province; d'autres encore, comme James Salter, pour la ville d'Autun (que même un Français a du mal à situer sur la carte!). C'est donc à Autun et aux alentours que se déroule le roman de Salter: Un sport et un passe-temps.

           Un étudiant américain, Phillip Dean, a une liaison (qu'on dira "torride") avec une très jeune française Anne-Marie sous le regard omniscient d'un narrateur non identifié dont on sait qu'il est américain, ami de l'autre et qu'il est capable de nous détailler la moindre scène d'amour entre Phillip et Anne-Marie même lorsqu'il ne tient pas la chandelle.

            Le charme du roman est une indéfinissable mélancolie qui semble imprégner la moindre scène, le moindre geste, la moindre pierre, la moindre rue au rythme des incessants trajets en vieille voiture américaine sur les routes de Bourgogne. L'intrigue se résume aux multiples scènes d'amour (très précises) entre l'étudiant américain et la jeune Française. Il ne se passe pas grand-chose et malgré tout, une tension progressive envahit le récit jusqu'au drame final. On referme le livre (paraît-il devenu culte) en se disant que la vie n'est finalement rien d'autre qu'une façon de passer le temps.

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25 février 2014 2 25 /02 /février /2014 10:42

Une guerre s'achève (celle dont on va nous parler jusqu'à plus soif cette année), une autre se profile à l'horizon: entre deux, la vie reprend dans toute son exaltation, ses plaisirs et ses désillusions. Voilà l'arrière-plan du roman d'Irène Némirovsky, Deux.
Antoine épouse Marianne même s'il n'est pas vraiment amoureux d'elle, il a une maîtresse pour laquelle il a une vraie passion et puis le temps passe: les sentiments s'usent, les rancœurs resurgissent, les familles se déchirent, des enfants naissent, des parents meurent. La vie est faite de petits compromis, de grands malentendus et de violence feutrée. Et l'amour dans tout cela? Chez Irène Némirovsky, il est désabusé et se consume aussi vite qu'une chandelle.
L'écriture est incisive, la peinture des sentiments d'une effrayante justesse. On assiste, fasciné et impuissant, aux vaines tentatives de bonheur et à la lente dérive des relations amoureuses. Dans ce court roman, d'un réalisme brutal, un et un font deux plutôt pour le pire que pour le meilleur.

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17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 12:41

          ProustVoilà cent ans qu'était publié le premier tome de la Recherche du Temps Perdu de Proust, première pierre d'une cathédrale gigantesque dont on n'en finit pas de gravir les marches et d'explorer vitraux et statuaire. Voilà cinquante ans mourrait Jean Cocteau qui commença très jeune de bâtir son oeuvre, laquelle est néanmoins davantage considérée comme un ensemble de chapelles plutôt qu'une nef géante.

          Parcours croisé de deux génies qui se sont connus, admirés et jalousés du temps de la Belle Epoque, cette période si féconde pour les arts et les sciences et à laquelle le premier conflit mondial (dont on s'apprête à fêter le centenaire... tiens, tiens!) mit un triste point final. Cette relation compliquée entre deux auteurs et deux oeuvres si différents et différentes est retracée par Claude Arnaud dans un petit essai intitulé: Proust contre Cocteau.

          cocteauL'ouvrage vaut surtout par la quantité d'anecdotes et d'annotations sur la vie culturelle de cette époque, sur les cercles dans lesquels ont évolué les deux hommes et sur le parcours des deux oeuvres (avec un accent mis sur celle de Proust plus que sur celle de Cocteau). Car par ailleurs, l'analyse des sentiments et des rapports ambigus qui caractérisent la relation entre Proust et Cocteau relève parfois de la psychologie de magazine (même littéraire).

         J'en retiens surtout une comparaison plutôt bien observée entre un Proust tortue et un Cocteau lièvre: le premier a mis du temps à s'imposer mais son oeuvre ne cesse de s'affirmer dans le panthéon universel et éternel de la gloire littéraire (et au-delà de la gloire, de la valeur littéraire) tandis que le second fut d'emblée et très jeune reconnu par ses pairs sans que pour autant ses créations n'imposent (à tort ou à raison) la même admiration perpétuelle. 

          L'un n'a vécu que pour son oeuvre, l'autre a vécu en faisant oeuvre.

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10 novembre 2013 7 10 /11 /novembre /2013 11:23

Un-week-end-dans-le-Michigan          S'il s'agissait d'un auteur français, on dirait que ce roman est bien le reflet d'une littérature française qui ne cesse de se regarder le nombril et qui manque de souffle narratif. Or, il s'agit de Richard Ford et de la littérature américaine, si énergique, si diverse... Pourtant Un week-end dans le Michigan ne m'a pas enthousiasmé.

          Voilà de quoi il retourne: nous suivons pas à pas, état d'âme par état d'âme, un écrivain "manqué" devenu journaliste sportif, tout au long du week-end de Pâques qu'il va passer dans le Michigan (là où il a fait ses études) afin de rencontrer un ancien sportif. De plus, il fait le déplacement en compagnie d'une jeune femme dont il est amoureux (car, vous l'aurez compris et comme de bien entendu, cet homme là est divorcé!).

          Nous voilà donc embarqué dans les petites misères et les recoins obscurs de la vie quotidienne et atrocement banale d'un américain moyen, vivant dans une banlieue moyenne mais quand même un peu cossue, et éprouvant des malheurs moyens. A l'exception du drame originel (qui, bien sûr, explique tout!) qu'est la perte de son fils victime d'une maladie foudroyante.

          On veut bien croire que c'est justement cet angle de vue qui permet à Richard Ford de revisiter l'american way of life et d'en faire la critique. Pourtant, ce roman ne nous surprend pas, ne nous emporte nulle part, il se traîne au même rythme que le narrateur et la lecture est souvent laborieuse.

          Si certains passages, de loin en loin, ne manquent pas d'un certain attrait notamment dans la lucidité et l'analyse des détails, il y a tout de même bien des longueurs dans ce week-end qui n'en finit pas.

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27 octobre 2013 7 27 /10 /octobre /2013 18:20

          vallotonSi l'on devait juger un roman au poids, La chute des géants de Ken Follett ne serait pas mal classé. Près de mille pages à avaler pour suivre, presque mois après mois, le destin de plusieurs personnages dans le tourbillon du premier conflit mondial.

          A propos de ces personnages, je note qu'aucun français n'en fait partie, ce qui au mieux relève de l'étourderie inconsciemment mâtinée de francophobie (encore un sale tour de l'éternelle perfide Albion) et au pire du contresens historique.

          Par ailleurs, il faut reconnaître que le profil de ces personnages ne fait pas dans l'analyse subtile et que les aristocrates ont toute la morgue qu'on attend d'eux, les ouvriers, évidemment exploités, sont en passe de prendre leur revanche car le bon sens populaire vient à bout de tout, les brutes sont brutales, les femmes féministes...

         Mais passons. Le mérite de ce pavé réside essentiellement dans sa capacité à d'une part nous rafraîchir la mémoire sur tous ces événements dont on va nous rebattre les oreilles l'an prochain pour cause de centenaire et d'autre part à nous faire sentir parfois subtilement parfois moins combien le monde d'avant va disparaître dans la Grande Guerre.

          Autant dire que j'attends avec impatience de découvrir le second opus tant me taraude la curiosité de savoir de quoi sera fait le monde issu de la der des der...

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18 août 2013 7 18 /08 /août /2013 12:02

          Etrusques          Les Etrusques avaient eux aussi le sourire mystérieux! C'est en tous les cas ce que nous enseigne José Luis Sampedro dans son roman La sonrisa etrusca.

          Un vieil homme, rongé par un cancer incurable, quitte son village calabrais pour rejoindre son fils à Milan pour des examens plus poussés. Dans ce nord abhorré, il découvre non seulement les Etrusques (la première scène du livre), la grande ville bourdonnante qu'est Milan mais aussi son petit-fils, nourrisson de quelques semaines, et bientôt l'amour d'une femme rencontrée par hasard dans un jardin public et elle aussi originaire du Sud.

          Le lecteur accompagne le vieil homme dans toutes ses pensées, dans sa lutte contre la maladie qu'il tente d'apprivoiser en la nommant familièrement (la Rusca), dans ses souvenirs d'ancien partisan, dans une dernière passion amoureuse apaisée et surtout dans sa relation avec l'enfant. Lui, l'homme dur et frustre du Sud impitoyable, il devient le plus doux et le plus attentionné des grands-pères, veillant sur l'enfant avec davantage de tendresse que les parents et lui donnant le premier rôle de ses derniers jours de vie.

          La subtilité de cette évolution progressive, vue par le regard du vieil homme lui-même et qu'il analyse de plus en plus lucidement, fait toute la beauté du roman. Nouvelle variation originale sur le thème du vieillard et de l'enfant, de la vie qui naît face la vie qui s'en va, c'est surtout une leçon de tolérance et d'humanité qui est transmise au lecteur: le Sud se réconcilie avec le Nord, la vieillesse avec la jeunesse, la ville avec la campagne, l'expérience ancestrale avec la modernité.

          Du fond des âges, les Etrusques sourient à la beauté éternelle de l'âme humaine et au triomphe de l'amour, malgré tout.

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28 juillet 2013 7 28 /07 /juillet /2013 18:30

H de Bingen          En dehors des saintes, les femmes d'exception ne sont pas si nombreuses à être reconnues par l'Eglise catholique: là aussi la parité se fait attendre! D'autant plus remarquables sont celles qui parviennent à imposer leur personnalité et leur savoir: c'est le cas d'une moniale du XIIème siècle, Hildegarde de Bingen dont le destin est retracé dans le court récit de Lorette Nobécourt joliment intitulé La clôture des merveilles.

          Dans une langue dépouillée et en même temps très élaborée, très proche de la poésie, il nous est donné de suivre au plus près Hildegarde dans les grandes étapes de sa vie et dans ses pensées les plus secrètes. Il nous est donné à voir la religieuse avec la même grâce et la même acuité que cette dernière voyait la révélation divine. 

          Femme sainte mais aussi femme de caractère qui, en cette époque d'écrasante domination masculine, non seulement s'impose à ses corréligionnaire et à la hiérarchie catholique mais a également l'audace d'écrire sa vision du monde en faisant du bonheur de vivre, et de vivre dans la présence de Dieu, sa constante préoccupation. Et l'on découvre une femme d'une extrême sensibilité au monde qui l'entoure: pour Hildegarde, le bonheur intérieur n'est possible qu'en s'appropriation la joie du monde extérieur.

          Et c'est par le verbe qu'elle chante la seule vérité qui compte vraiment: la "vie vivante" dans l'enceinte merveilleuse de la clôture monacale.  

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28 juillet 2013 7 28 /07 /juillet /2013 18:09

L Sepulveda          Tuer n'est pas une mince affaire, encore moins lorsqu'on en fait son gagne-pain! Le manque de professionnalisme, comme dans beaucoup d'autres entreprises, mène souvent au désastre. Voilà qui constitue la trame de la nouvelle de Luis Sepulveda intitulée Journal d'un tueur sentimental.

          Le tueur à gage en question est amoureux, voilà son talon d'Achille. Si la femme est l'avenir de l'homme, comme l'a chanté le poète, elle peut aussi le conduire à sa perte lorsque l'on mêle business et sentiments. Bref, dès les premiers mots du journal, le lecteur comprend qu'un coeur palpite sous la cuirasse du tueur et quelques jours et pages du journal plus tard, sa dernière mission tourne au fiasco.

          L'auteur chilien déploie beaucoup d'humour autour d'un sujet qui a priori en manque quelque peu et nous voilà embarqué avec enthousiasme dans la galère d'un meurtrier au grand coeur.  

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13 juillet 2013 6 13 /07 /juillet /2013 16:56

          Carson McCullersLe titre, déjà, est un accroche coeur! Comme dans bien des chefs d'oeuvre, l'art d'assembler des mots d'une manière incongrue ou inattendue provoque une réaction d'envie chez le lecteur et cet assemblage inhabituel révèle aussi l'essentiel du roman. Ainsi du célébrissime roman de Carson Mc Cullers: Le coeur est un chasseur solitaire!

          Quelques personnages affrontent leur solitude dans une ville anonyme du sud des Etats-Unis quelques temps avant la Seconde Guerre mondiale. Une jeune fille, Mick, découvre la dureté de la vie, la misère, le travail et les premiers émois: elle se réfugie bien dans "l'espace du dedans", ce monde intérieur de rêve et de musique mais peu à peu "l'espace du dehors" la rattrape cruellement. Un vieux médecin noir, le docteur Copeland, lutte pour améliorer le sort des gens de couleur mais il doit bientôt capituler devant les implacables meurtrissures que le destin lui inflige à lui et à sa famille. Un communiste, Jack, voudrait changer le monde mais il n'est que colère et solitude noyées dans l'alcool. Un sourd-muet, Mr Singer, se trouve séparé de son meilleur ami, sourd-muet comme lui et en éprouve une immense souffrance: tous le pensent serein mais il est de tous le plus fragile et la mort de son ami l'achève. Le roman s'achève pourtant sur une note positive: Biff, le barman veuf, après la désespérance habituelle de chaque nuit, finit par "se prépar[er] posément à l'arrivée du matin".

 

          Comme si, malgré la solitude des coeurs, malgré la montée des périls en Europe dont on a, de loin en loin, des échos, la vie devait continuer comme la clarté du matin succède immanquablement à l'obscurité de la nuit... du chasseur!

 

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Quatrième De Couverture

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Parole d'auteur

"... je connaissais l'histoire de dizaines d'écrivains qui essayaient d'accomplir leur travail malgré les innombrables distractions du monde et les obstacles dressés par leurs propres vices."

 

Jim Harrisson in Une Odyssée américaine

 

"Assez curieusement, on ne peut pas lire un livre, on ne peut que le relire. Un bon lecteur, un lecteur actif et créateur est un relecteur."

 

    Vladimir Nabokov in Littératures

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Le Temps Retrouvé